Festival Petits Bonheurs : L’ombre et le hibou
Aux Petits bonheurs l’an dernier à la Maison de la culture Maisonneuve, Fine mouche et les petites gouttes d’or, une production orchestrée par La Nef, avait comblé l’auteur de ce compte-rendu. Au même endroit pour l’actuelle édition, une création en première mondiale de la même compagnie, L’ombre et le hibou, constitue lui aussi un moment de joie et d’enthousiasme.
Pendant une cinquantaine de minutes, la fable musicale pour les toutes petites et les tout-petits se permet de nouvelles explorations avec des instruments « inventés » pour l’occasion, dont des flûtes en os, en corne et en bois. Comme pour Fine mouche, l’histoire est racontée par la merveilleuse musicienne, chanteuse et comédienne Suzanne De Serres (qui a aussi écrit la partition), aussi curieuse et allumée qu’une petite fille. Celle-ci est accompagnée par deux camarades, le multi-instrumentiste João Catalão à la direction musicale et Marie Julie Peters-Desteract à la mise en scène, à la scénographie et à la conception des jeux d’ombres.
Le public est invité à suivre les aventures de jumeaux, Anatole et Bernadette, à la recherche de leur petit chien perdu. Les deux gamins se retrouvent dans une grotte aux nombreux secrets inspirés de légendes préhistoriques, une grotte qui évoque la célèbre grotte de Lascaux. Tout au long du périple, la narratrice nous encourage à participer à diverses reprises par la répétition en chœur de couplets de chansons (comme pour la réalisation précédente de La Nef), mais aussi par la recréation de bruits insolites (comme de répéter l’action de détacher des souliers en velcro ou de jouer avec une fermeture éclair) et de gestes précis (reproduire le mouvement d’une vague en levant les bras, en plus de simuler par la même occasion l’effet de gouttelettes de pluie en bougeant les doigts).
Si l’expérience rappelle celle de Fine mouche, l’exécution scénique de L’ombre et le hibou ose sortir davantage des cadres rassurants de la logique pour aller au plus près des sensations. Cette audace se répercute notamment dans le travail sur les ombres et les illustrations vues derrière un rideau, comme lors des apparitions d’une boule lumineuse. Les atmosphères évoluent tout au long de la représentation, passant du rythme effréné du film d’aventure à des passages plus contemplatifs.
La production se permet également des incursions musicales dans un répertoire peu entendu sur les scènes (période de la Renaissance, présentée dans le programme comme « préhistorique »), en plus d’apporter des couleurs entraînantes à l’ensemble (surtout dans les segments plus percussifs). Un peu avant le dénouement, l’auditoire s’est manifesté avec un enthousiasme communicatif d’une force rarement entendue ces dernières années lors de festivals ou en programmation régulière.
Une merveille comme L’ombre et le hibou mérite de déployer son imagination et sa folie d’innombrable fois.