Pas perdus : Un objet de beauté

Pas perdus : Un objet de beauté

Pendant cette douloureusement longue période où l’on a été privé de théâtre, et même de contact humain, nous avons collectivement pris conscience d’une profonde absence de connexion; une connexion qu’aucune émission de télévision ni captation ne pourra jamais faire vivre aussi intensément qu’une production théâtrale comme Pas perdus, troisième documentaire scénique d’Anaïs Barbeau-Lavalette et d’Émile Proulx-Cloutier, après Vrais mondes et Pôle Sud.

« Pas perdus », comme dans hall des pas perdus, un lieu où tant d’individus se croisent et s’entrecroisent sans se connaître, mais aussi comme dans traces, repères, mémoire et héritage qu’on ne voudrait pas voir disparaître. Le documentaire scénique que nous offre généreusement le duo créatif est un véritable phare dans une nuit faite de nouvelles et d’actualités déprimantes, une oasis chaleureuse et accueillante.

Sur scène, des non-acteurs qui pourraient être nos voisins, des collègues, des amis, des membres de la famille s’ouvrent à nous avec une générosité et une candeur admirables. Ils se livrent avec pudeur et sensibilité en répondant aux questions pleines de tendresse de Barbeau-Lavalette, nous parlent de leurs loisirs, de leurs métiers, de leurs angoisses, de leurs grands bonheurs comme de leurs énormes peines, de leurs doutes aussi bien que de leur sentiment d’injustice ou de leur colère. C’est par leurs voix captées sur enregistreur et qui résonnent dans la salle, mais aussi par leurs petits gestes quotidiens reproduits en silence sur scène que leur vie se dévoile à nous pour venir se loger directement dans notre coeur. La conception narrative et la mise en scène signées Émile Proulx-Cloutier épousent en toute simplicité les propos des interviewés et accordent à chacun un espace pour briller. Les presque deux heures de la représentation filent à toute vitesse.

Pas perdus démontre de manière éclatante, sans jamais faire la morale, l’importance de la transmission, celle de l’histoire, des traditions et de la culture. Chacun à sa manière, les Yaëlle, Quentin, Réal, Dominic, Eva, Jérôme, Sylvain, Élisabeth et tous les autres parlent du besoin de laisser des traces, de tisser des liens, tant qu’on est encore en mesure de le faire et de comment ces traces et liens nous rassemblent en tant que société. Leurs confidences soulignent aussi l’importance d’être à l’écoute de toute cette beauté autour de nous, en nous. D’ailleurs, la très belle scénographie de Julie Vallée-Léger porte le même message avec sa façade de briques où l’on devine les traces laissées par un bâtiment aujourd’hui disparu, comme ces silhouettes fantômes qu’on aperçoit parfois en ville au détour d’un immeuble et qui nous font nous demander ce qui se dressait là… avant. Les projections vidéo de Marielle Dalpé et les éclairages de Mathieu Roy jouent aussi habilement avec ces concepts de traces et d’impermanence.

Chacun des huit humains qui défilent devant nous prouve que chaque histoire mérite d’être entendue et qu’on gagnerait à prendre le temps de s’écouter vraiment les uns les autres, de s’ouvrir les uns AUX autres. Pendant ce court moment de communion, la production nous rappelle que la lumière existe, que l’humanité peut être magnifique, et ça, franchement, alors que des murs infranchissables semblent se dresser de plus en plus entre nous, c’est un message porteur qui fait un bien fou.

Crédit photo Valérie Remise


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