par Daphné Bathalon, à Avignon

On ne peut faire autrement que de « vivre Avignon » dès qu’on y pose les pieds en temps de festival. Il y a d’abord le IN, prestigieux, prometteur, alléchant, casé à l’abri des regards entre les murs de salles fameuses telle la Cour d’honneur du Palais des papes où Le Maître et Marguerite, une impressionnante fresque de trois heures qui fait sensation ces jours-ci (nous y reviendrons). Puis il y a le OFF, bouillant, tentaculaire et quasi incontrôlable, qui s’affiche comme le plus grand théâtre du monde. Il offre un vaste choix de 1161 spectacles en 120 lieux. Le programme fait à lui seul 348 pages! Les spectateurs cavalent d’un bout à l’autre de la ville dans le vain espoir de ne rien manquer.

JE N’AI ABSOLUMENT PAS PEUR DU LOUP!
Isle 80, 18 place des Trois Pilats

Pour commencer en douceur, mon choix s’est porté sur un conte pour adultes et pour enfants. C’est au théâtre de poche Isle 80 que la compagnie Jeux de mains, jeux de vilains propose jusqu’au 28 juillet Je n’ai absolument pas peur du loup! Les trois comédiens misent uniquement sur leurs mains pour mettre en images deux grands classiques de notre enfance : La chèvre de monsieur Seguin, de Daudet, et Pierre et le loup, de Prokofiev.

La partition à six mains esquisse le décor en quelques gestes bien posés et y plante des personnages au caractère trempé, depuis l’ingénieuse petite chèvre jusqu’au terrible loup en passant par l’énergique colibri, le canard pataud, particulièrement réussi, et le curieux petit Pierre. Les mains, les doigts, les bras… et même le creux d’une épaule se transforment en autant d’éléments de l’histoire. En un tournemain, ils nous transportent de l’enclos exigu de la chèvre de M. Seguin au col de la montagne où elle rencontre le loup. La compagnie s’est merveilleusement approprié les contes pour les traiter à sa manière originale tout en ajoutant un peu de piquant à la sauce. Avec son théâtre de mains, la compagnie se penche sur les peurs évoquées dans les deux récits ainsi que sur le lot d’interdits et de violence qu’ils contiennent. La chèvre de M. Seguin, après avoir goûté la liberté dans la montagne, sera-t-elle forcément la docile victime du grand méchant loup? Et Pierre, choqué par la mise à mort du loup, choisira-t-il de se révolter?

Le langage de ce spectacle est poétique et universel, tout comme le sont les deux belles histoires qui nous sont habilement contées.

Autres spectacles du Off vus ce premier jour (critiques à venir) : Cabaret de l’impossible et La tempête.

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