par Daphné Bathalon

Lundi soir dernier, le Club Soda était rempli à craquer pour le lancement de cette nouvelle et déterminante saison de la Ligne nationale d’improvisation. Après avoir fait beaucoup parler d’elle et de ses difficultés financières ces derniers mois, la LNI avait le cœur à la fête pour ce premier match de 2016. S’y retrouvaient les équipes des Rouges-FTQ et des Bleus-CSN, détenteurs de la coupe Charade 2015.

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La FTQ, la CSN, Québecor, Téo-Taxi et Les Ateliers VAP sont les nouveaux grands partenaires de la LNI. À l’instar des bandes de patinoires de la LNH, celle de la LNI se couvre donc cette année des couleurs de ces commanditaires, de même que les chandails des joueurs et la salle du Club Soda elle-même. Si leur présence est forte, l’ensemble ne fatigue pas trop l’œil et la commandite se fait plus discrète pendant les improvisations (aucune référence directe lors de ce match, heureusement). Le trophée Yvon-Leduc, remis au joueur ayant fait la meilleure utilisation de la langue, sera rebaptisé pour les cinq prochaines années le trophée Antidote, du nom du produit vedette des éditions Druide, autre grand partenaire de la LNI cette année. À la fin de chaque match sera décernée une mention Antidote au joueur s’étant démarqué. Le joueur cumulant le plus de mentions remportera donc le trophée en fin de saison.

Les claques font également leur retour, auprès des abonnés seulement, au grand plaisir des uns et au grand déplaisir des autres. C’est que les fameuses claques ne font l’unanimité nulle part…

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Après la traditionnelle présentation des équipes, qui n’ont pas connu cette année de grand rebrassage, l’intransigeant arbitre Simon Rousseau a donné le coup de sifflet qui a lancé la première période. Celle-ci a démarré lentement alors que les joueurs de chaque équipe et leur entraîneur s’échauffaient en prenant le pouls de la salle. En mixte pour la première improvisation, Chaîne de montage, Christian Laurence, entraîneur des Bleus, a décidé d’envoyer d’entrée de jeu son substitut Arnaud Soly, qui remplaçait le vétéran Réal Bossé. La nervosité des joueurs Soly et LeLouis Courchesne (Rouges), vite rejoints par Frédéric Barbusci (Bleus) et Simon Boudreault (Rouges), n’a pas donné lieu à une improvisation très soutenue. Après la deuxième mixte, L’espièglerie des Carmélites, mettant en vedette les joueuses des deux équipes, l’arbitre a d’ailleurs tenu à prévenir les joueurs de relever le niveau en collant une pénalité de cabotinage à la joueuse Florence Longpré (Bleus).

Message entendu. Avec Miaw, miaw… miaw, miaw, miaw, miaw, une autre mixte, de trois minutes cette fois, Courchesne et Barbusci ont servi une jouissive leçon d’incompréhension entre un maître et son chat. Elle a été suivie d’une rimée mixte, Processus de maturation, délirante à souhait avec un Boudreault en forme dans le rôle de l’ado en rébellion et Virginie Fortin (Bleus) dans celui de la mère inquiète. Fortin a néanmoins récolté une solide pénalité de décrochage, ce qui ne l’a pas empêchée de revenir en force dans la comparée Las Vegas où elle a soulevé la foule avec son imitation de Céline Dion en deuil, un choix osé, mais payant, qui a permis à son équipe de briser l’égalité en début de deuxième période, l’improvisation des rouges ayant été reportée après la pause.

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C’est d’ailleurs en deuxième période que le match a véritablement décollé avec une panoplie d’univers originaux et éclatés. Le public du Club Soda a eu droit à une série d’improvisations à un joueur par équipe, où, notamment, Barbusci, en paparazzi peu repentant et Eve Landry (Rouges), en accro des réseaux sociaux, ont pu briller tour à tour. Les équipes ont continué à s’échanger les impros remportées au fil de cette période marquée par deux excellentes comparées chantées sur le thème Sans arrêt!, la première sur un ton plus rock par Landry en employée blasée d’un Couche-Tard auquel elle a fini par mettre le feu, et la seconde plus rap par Soly en joggeur infatigable. La comparée à la manière d’un haïku Fines philosophies florales aura donné un peu de fil à retordre aux deux équipes, qui ont tout de même réussi à offrir deux propositions très différentes, mais bien maîtrisées.

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À égalité en début de troisième période, les Rouges et les Bleus ont joué du coude pour s’imposer sur la patinoire et se démarquer avant la fin du match. Les joueurs ont d’abord patiné un peu sur la bottine avec la première impro, une mixte de cinq minutes intitulée La pluie jaune avant de se reprendre avec une délirante Kale et cacophonie, suivant les déboires créatifs du duo de rockeuses végétaliennes Satan and tofu, incarnées par Fortin et Diane Lefrançois (Rouges). La mixte de huit minutes La commission de Consuela, à la manière du théâtre de l’âge d’or espagnol, a été moins heureuse, alors que les joueurs des deux équipes ont peiné à préciser les motivations de leurs personnages et les enjeux de cette histoire d’héritage, d’amour et de tentative d’assassinat. L’arbitre s’est d’ailleurs montré sévère en collant une pénalité majeure de confusion aux deux équipes. L’accumulation de points de pénalité n’a heureusement mené qu’à un échange de point entre les équipes. Après ses deux impros remportées par les Bleus, les tenants du titre semblaient toutefois sur leur lancée. C’est la charmante Bromance de banlieue, portée par deux duos, soit Boudreault-Barbusci et Soly-Courchesne, qui a permis aux Bleus de briser l’égalité et de s’emparer pour l’instant de la tête du classement. Cette mixte de quatre minutes à deux hommes par équipe a offert une histoire d’amour fraternel presque touchante entre policiers et cambrioleurs. Marque finale 8 à 7 pour les Bleus.

Crédit Hugues Bergevin
Crédit Hugues Bergevin

À sa première participation à la LNI, le joueur remplaçant Arnaud Soly a offert un bel aperçu de son imagination fertile et reçu une troisième étoile tout à fait méritée. Ce sera un plaisir de le revoir sur la patinoire. Virginie Fortin, solide comme toujours, a quant à elle récolté la deuxième étoile du match. Malgré sa légère indiscipline, LeLouis Courchesne a de nouveau fait la démonstration de son excellent sens de la répartie tout au long du match, ce qui lui a valu la première « première étoile » de la saison. Simon Boudreault, déjà détenteur de deux trophées Yvon-Leduc, a reçu la première mention Antidote.

Au vu de ce premier match, il semble bien que les incertitudes financières de la ligue ne sauront pas assombrir ni atténuer l’éclatante énergie des joueurs et leur capacité à rebondir.

Prochain match, lundi 15 février : les Bleus affronteront les Jaunes.

www.lni.ca

Crédit Hugues Bergevin
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