Jamais Lu 2022 : Soirée d’ouverture – L’irréversible folie de la fiction
Jamais Lu 2022 : Soirée d’ouverture – L’irréversible folie de la fiction
Le 21e festival du Jamais Lu s’est ouvert jeudi 5 mai avec une soirée chaotique à souhait. « L’irréversible fiction » qui guide cette édition du festival n’a pas été qu’un simple slogan publicitaire pour cette première soirée où le mot d’ordre était certainement le plaisir retrouvé.
La soirée s’est entamée par les discours habituels de bienvenue, courts comme on les aime, et par la présentation de la cellule artistique de cette année : Olivier Arteau, Alexandre Castonguay, Marcelle Dubois et Tamara Nguyen. Puis, a suivi la maintenant incontournable lecture du texte issu de la campagne du microdon. Cette fois, c’est l’actrice et autrice Catherine Trudeau qui a relevé le défi d’écrire un texte à partir des mots attribués par les généreux donateurs. Le récit du Dimanche presque parfait de Louison s’est révélé aussi coloré et pimenté que son autrice, qui a merveilleusement bien intégré tous les mots qu’on lui avait, parfois malicieusement, mis dans les pattes. Mention spéciale à jubjoter et à grupettos, au déjà plus d’actualité Wordle, aux inattendus pachydermes et au distingué gongorisme. C’est à lire ou à relire en ligne!
En formule décontractée, mais chronométrée (!), le public réuni au Théâtre aux Écuries a assisté en direct à la création d’un film à plusieurs mains. Dans ce Vidéoclub de la dernière chance, figé en 1998 avec ses boîtiers VHS et sa boîte de retours devenue inutile, quatre auteurs et autrices, un musicien et quatre interprètes se sont courageusement prêtés au jeu. Derrière leurs ordis et leurs imprimantes, Gabrielle Chapdelaine, Mario Laframboise, Catherine Léger et Mireille Tawfik ont dû écrire trois scènes à coup de 10 minutes chaque fois : une situation initiale, un conflit et un revirement, en ayant en tête la scène de dénouement, préalablement écrite et que les interprètes Jade Barshee, Anna Beaupré-Moulounda, Alexandre Castonguay et Hubert Lemire nous ont lue une première fois en guise d’introduction.
Déjà périlleux, l’exercice s’est encore corsé par l’ajout de contraintes tirées au hasard, parmi lesquelles le public a pu glisser les siennes pour la troisième scène. Entre film porno, rom com, film noir, inclusion d’un personnage qui mange une saucisse italienne, vaisseau spatial, cascade et rap battle, les auteurs ne l’ont vraiment pas eu facile. C’est au public qu’est revenu le plaisir de sélectionner la meilleure des quatre propositions pour chaque scène. Le talent et le sens du comique des interprètes et de l’animatrice de la soirée, Carolanne Foucher, ainsi que l’apport musical d’Adrien Bletton ont quelque fois sauvé les meubles d’un fil narratif échevelé, même si les auteurs nous ont eux-mêmes offert plusieurs perles, qui ont déclenché l’hilarité générale.
Soirée longuette tout de même, parsemée de pauses pour donner le temps d’écrire la scène suivante, ce Vidéoclub de la dernière chance a gentiment lancé les dix jours de célébration d’écritures contemporaines, de nouvelles paroles, de textes théâtraux inédits. Le Jamais Lu, c’est l’occasion d’entendre une foule d’auteurs et autrices, mais aussi d’échanger avec eux, d’acheter des textes dramatiques à la micro librairie présente sur place (faites le plein pour l’été, comme nous y invitait la directrice artistique et générale du festival – et Chevalière de l’ordre des Arts et des Lettres depuis avril dernier! – Marcelle Dubois en soirée d’ouverture), et tout ça autour d’un verre ou d’une bouchée.
Les prochains jours promettent des lectures tout aussi hétéroclites et audacieuses, notamment le Michelin de Michel-Maxime Legault, ce dimanche, qui nous offrira les réflexions d’un hypersensible né en milieu agricole, et un marathon de lectures samedi prochain, de 15h à 21h.
Le Jamais Lu, festif, rassembleur, porteur, irrésistible, parfois chaotique, mais toujours sympathique, est de retour en ville et en présentiel… Vive le Jamais Lu !