L’ENVERS : un chaos aux allures surréalistes

L’ENVERS : un chaos aux allures surréalistes

Qui, enfant, n’a pas joué au restaurant, comme on joue à l’école ou au docteur ? C’est comme si le service de table faisait partie de notre ADN et on oublie souvent qu’il s’agit en fait d’un métier qui nécessite de multiples apprentissages. Dans la nouvelle production L’Envers, de la compagnie Parabole, la jeune serveuse en entraînement, Emmanuelle (Laura Amar), l’apprend rapidement à ses dépens.

L’œuvre met en scène les employés d’un restaurant italien, le Gattuso, qui, lors d’une soirée aux allures apocalyptiques, se retrouvent rapidement plongés dans l’eau chaude. Alors que la cheffe des cuisines, Sandra (Nadia Girard Eddahia), tarde à donner signe de vie, le sous-chef, Oli dit La Sauce (Vincent Massé-Gagné), le commis débarrasseur communément appelé le busboy, Francis (Silviu Vincent Legault), et le gérant, Mark (Jocelyn Paré), vivent une soirée qui vire au cauchemar pendant que la nouvelle serveuse peine à trouver ses repères. Et l’arrivée du propriétaire, Aldo (Maxime Perron), dans un restaurant bondé, n’est pas pour faciliter les choses.

Comédie de situation, la pièce mise sur l’action plutôt que sur le caractère des personnages. Le texte et la mise en scène de Blanche Gionet-Lavigne sont tissés de plusieurs fils dramatiques qui créent des scènes loufoques, étranges ou farfelues, et qui parfois tournent court. Ancré dans un environnement un peu particulier, le restaurant résiste à l’opération de démolition que les frères du propriétaire, les Gattuso, ont entreprise dans le quartier. Bruits de marteau-piqueur, déflagrations et secousses se mélangent à la musique d’ambiance, au brouhaha des clients et aux coups de gueule du personnel qui n’a pas été payé depuis quelque temps. Le climat chargé de confusion se veut cocasse et l’histoire flirte avec le grotesque : alors que les habitations s’effondrent dans la rue et que les résidents expropriés ont dressé des abris de fortune en criant famine, dehors des clients rageurs font la file pour venir manger au restaurant. Certaines scènes suscitent le rire, mais, dans le contexte actuel de la guerre en Ukraine, elles perdent de leur efficacité en revêtant malheureusement une tout autre signification.

Crédit photo David Mendoza Hélaine

La conception sonore de Samuel Sérandour, les éclairages d’Émile Beauchemin et le décor de Marianne Lebel créent une sorte de chaos aux couleurs surréalistes qui s’accentue au fur et à mesure que le tumulte extérieur envahit l’intérieur. Cet empiètement se traduit par une intensification de la poussière issue des décombres, la présence de flashs lumineux orangés, l’apparition d’effets stroboscopiques et l’amplification des sons. L’ensemble de ces éléments scénographiques créent une atmosphère dense et anxiogène alors que, dans le jargon de la restauration, l’heure du coup de feu bat son plein. Avec la cuisine à cour et la salle à jardin, les principaux espaces du restaurant sont représentés. Et une fois les conventions installées – les portes, la cuisinière, le réfrigérateur, la nourriture, la boisson et la clientèle sont imaginaires – le spectateur peut s’attarder aux autres signes de la représentation.

Au théâtre de Premier Acte, diffuseur qui propose des œuvres d’artistes de la relève, le public est habitué de rencontrer des paroles émergentes. La compagnie Parabole fait partie de celles-ci. Malgré quelques imperfections sur le plan de l’écriture et de la mise en scène ainsi qu’une certaine inégalité dans l’interprétation, les spectateurs semblent avoir passé un bon moment le soir de la première. C’est qu’au-delà de ces lacunes, les comédiennes et comédiens vibraient d’une énergie communicative. Sans doute que cette production pourra se bonifier avec le temps.

Crédit photo David Mendoza Hélaine


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Calendrier

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Du 15 mars au 2 avril 2022

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