Auteur/autrice : Hélène Laliberté
D.écimées : retrouver ses origines
Alors que le scandale des pensionnats autochtones fait couler de l’encre. Que la mémoire des orphelins de Duplessis demeure vive. Que les pressions sur le gouvernement s’intensifient afin d’autoriser un plus grand accès aux informations pour les parents biologiques et les enfants adoptés ou non adoptés qui ont été séparés à la naissance. Que les impacts des dissociations précoces mère/poupon sont de mieux en mieux étayés, la pièce, D.écimées, présentée au Théâtre Périscope par la compagnie Les Gorgones en coproduction avec Carte blanche, est en phase avec son époque.
N’essuie jamais de larmes sans gants : un requiem finement orchestré qui fait œuvre de mémoire
Le Théâtre du Trident fait œuvre de mémoire en cette fin d’hiver en présentant la production, N’essuie jamais de larmes sans gants, d’après le roman de l’écrivain, dramaturge et scénariste suédois Jonas Gardell, adapté pour la scène par Véronique Côté, comédienne autrice et metteure en scène de Québec. La pièce retrace, à travers les péripéties des membres d’une petite cellule gaie de Stockholm, les débuts du sida. Alors que cette nouvelle infection mortelle se répand à une vitesse folle et touche prioritairement les communautés homosexuelles, la société cherche des coupables et impute à ces communautés l’apparition du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et la progression de l’étrange maladie qu’elle génère, au lieu d’explorer des moyens de protéger et d’aider les personnes les plus exposées.
Le Show sur l’effondrement qui n’aura pas lieu : une singulière assemblée
Porté par un collectif d’artistes et produit par le Bureau de l’APA, Le Show sur l’effondrement qui n’aura pas lieu est présenté par ses créateurs comme une conférence-démonstration. À l’intérieur d’une structure de départ consacrée, une assemblée générale est déboulonnée par ses participants, lesquels incluent le public. Livré sous forme de journal de bord, le discours qui étaie la performance se frotte aux distorsions causées par les voix, les sons, la musique, les images et les actions dans une sorte de désordre organisé. Les interprètes (Laurence Brunelle-Côté, Bernard Langevin, Félix Fradet Faguy, Marie-Loup Cottinet, Julie Cloutier Delorme, Robert Faguy et Alain-Martin Richard) y incarnent leur propre rôle pour donner libre cours à leurs réflexions sur la notion d’effondrement appliquée tant à l’individu qu’à la société.
Le garçon de la dernière rangée : une intrigante sensation de catastrophe imminente
Le garçon de la dernière rangée relate les élucubrations d’un étudiant sournois et ténébreux, Claude (Vincent Paquette), qui s’immisce dans la demeure d’un camarade de classe, Raph (Samuel Bouchard), pour satisfaire sa curiosité maladive. En transposant par écrit son expérience intrusive, il avive un besoin malsain chez son professeur de littérature (Hugues Frenette) qui, à l’instar des spectateurs, se transforme en voyeur par personne interposée. Le talent de Claude pour les lettres se démarque des compositions insipides des autres étudiants, ce qui pousse l’enseignant blasé à provoquer, par le biais de critiques acerbes, les desseins déviants de son élève.
Albane : briser le cycle infernal de l’atavisme
Première production de la compagnie théâtrale La bouche _ La machine, Albane d’Odile Gagné-Roy est également la première mise en scène de cette jeune autrice et comédienne qui interprète le rôle-titre dans le spectacle. À l’ouverture des portes de la salle, six des sept personnages de la pièce sont déjà en place, immobiles comme des êtres inanimés qui attendent qu’on leur prête vie. L’impression qui se dégage du décor et des accessoires, dont certains sont surdimensionnés, des masques et des maquillages ainsi que de l’éclairage est intrigante et d’emblée porteuse de promesses.
Les glaces : au jour de la débâcle
Se fracasser contre les glaces provoque des secousses, génère du vacarme, crée des dommages ! Les glaces que l’autrice Rébecca Déraspe a choisi de briser dans cette œuvre théâtrale bousculent, heurtent et ouvrent le précipice béant du passé dans lequel Noémie (Valérie Laroche), Vincent (Christian Michaud) et Sébastien (Olivier Normand) dégringolent, entraînant leurs proches dans leur sillage. Vingt-cinq ans après l’événement qui a bouleversé sa vie, Noémie décide de se confronter à ses agresseurs et de les accuser personnellement de viol. Sans se consulter préalablement, les deux hommes retournent dans le Bas-Saint-Laurent, en plein hiver, pour tenter de calmer les choses. Mais les plaies, même recouvertes d’épaisses couches de gel, demeurent vives.
Kitchen Chicken : un antidote à la morosité
Après avoir été présentée pour la première fois à Québec dans le cadre du Mois Multi, en 2019, et avoir conquis, entre autres, Lyon, Vancouver, Toronto, Kingston, Montréal, Rimouski, sans oublier Saint-Casimir, la production Kitchen Chicken de L’orchestre d’hommes orchestres (L’ODHO) atterrit au Théâtre Périscope pour égayer le mois de décembre, semer de la joie, de l’éclat et de l’admiration en cette saison du temps des Fêtes. Les mots semblent tous trop faibles pour décrire l’explosion de bonheur que suscite la représentation. Pour rendre justice à la virtuosité vocale de Gabrielle Bouthillier et Danya Ortmann. Pour saluer les performances musicales et théâtrales de l’équipe d’interprètes qui, en plus des deux jeunes femmes, est composée de Bruno Bouchard, Jasmin Cloutier, Simon Elmaleh et Philippe Lessard-Drolet.
Box Exp. : une dystopie futuriste
Box Exp. est une œuvre du Collectif Bleu, un groupe ad hoc de jeunes artistes formé pour mener à terme le projet de création et de diffusion d’une pièce de théâtre qui touche à des préoccupations actuelles transposées dans un avenir proche. La production présentée à Premier Acte se décline en cinq tableaux qui traitent notamment des répercussions, voire des perturbations, que les moyens technologiques de plus en plus raffinés ont sur les êtres humains, comment ils influent sur leur quotidien et orientent leurs façons d’interagir.
Alice : un fantastique moment de rêverie
Librement inspirée des œuvres de Lewis Carroll par l’autrice et comédienne Emmanuelle Jimenez, Alice, la coproduction du Théâtre du Trident et du Théâtre Rude Ingénierie (TRI), s’adresse à l’enfant enraciné en nous. Mais peut-on parler d’un conte pour enfants ? Le monde dans lequel évolue le personnage principal de la pièce n’a rien de naïf ou de puéril, voire de juvénile. C’est un monde d’adultes, de bêtes étranges et d’automates réglés comme du papier à musique. Un monde de conventions, truffé de non-sens, de contresens et de doubles sens, qui recèle des mystères et des menaces très concrètes pour Alice.
Grosse-Île, 1847 (dans les mots de ceux qui l’ont vécu) : Apprendre de l’histoire ?
Plusieurs connaissent Grosse-Île, jadis appelée Grace Island. Elle est située à l’est de l’Île d’Orléans, dans l’archipel de l’Isle-aux-Grues et a servi au 19e siècle de station de quarantaine pour les multiples bateaux d’immigrants qui affluaient vers le Canada. Mais est-on nombreux à connaître la véritable histoire de ce lieu et les drames qui s’y sont déroulés, alors que la maladie emportait les nouveaux arrivants ? La production du Théâtre de la Bordée met en lumière les événements dévastateurs de 1847 au moment où la petite île de 7,7 km2 s’est retrouvée aux prises avec un étrange microbe qui a tué quelques milliers d’êtres humains venus d’Irlande pour chercher un monde meilleur.