Soeurs sirènes : Comme un poisson dans l’eau

Soeurs sirènes : Comme un poisson dans l’eau

Thèmes de prédilection en théâtre jeune public, l’acceptation de la différence et le dépassement de soi ont donné au fil des années de nombreux excellents spectacles. Soeurs sirènes, de la compagnie Libre Course, fait désormais partie de ceux-là.

Après une période de création perturbée par la pandémie, la production prend son envol depuis quelques mois en charmant le jeune public et leur famille. À la Maison Théâtre, par un dimanche de fin d’hiver, les regards allumés des enfants brillaient autant que le soleil dehors.

La vie de Charli et d’Agnès a basculé le même jour de l’année précédente, mais tandis que la médaille remportée par l’un le propulsait vers le Championnat canadien junior de plongeon, le terrible accident de l’autre lui faisait perdre ses deux jambes. Deux trajectoires qu’on pourrait croire divergentes, mais qui se croisent pourtant à la piscine du quartier, où Charli et Agnès se découvrent une complicité unique, qui les aidera à affronter leurs peurs et à se faire confiance. Inspirante et sincère, leur amitié, avec ses hauts et ses bas, donne le ton à une production qui va droit au coeur, tout doucement.

Soeurs sirènes porte un message important pour tous les enfants qui se sentent différents, celui que rêver des choses impossibles est permis et qu’on ne devrait pas avoir à cacher qui on est. Sous la plume d’Elie Marchand, cette très belle histoire d’amitié souligne tout le courage nécessaire pour habiter son corps à sa manière et pour s’affirmer malgré le regard parfois moqueur des autres. Avoir des jambes en plastique ou vouloir porter du rouge à lèvres et des maillots « de fille » ne sont pas des secrets honteux.

Crédit photo Jessy Lewandowski

Le thème de l’eau baigne toute la production mise en scène par Marie-Eve Lefebvre, des projections vidéo à la lumière et au son, créant un univers enveloppant. Des gradins, pièce centrale de la scénographie, forment un îlot refuge pour les attendrissants Charli et Agnès. Ils se transforment en un instant en bord de piscine, en chambre, en baignoire, en tremplin et même en fond océanique pour mieux raconter les défis relevés par les deux personnages. Il faut d’ailleurs saluer l’apport des animations vidéo, qui illustrent à merveille le cheminement émotionnel des jeunes, et surtout l’excellent travail d’Andréa Marsolais-Roy dont la conception sonore nous transporte dans le monde aquatique avec ses clapotis, éclaboussures et échos marins.

La production compte aussi sur un touchant duo d’interprètes. Tant Marie Fannie Guay (Agnès) que Cha Raoutenfeld (Charli) insufflent à leur personnage une sensibilité à fleur de peau et une grande fragilité qui se transforme en leur plus grande force grâce à leur amitié. Raoutenfeld convainc particulièrement grâce à une interprétation qui met subtilement en lumière les émotions conflictuelles et les envies qui traversent le jeune plongeur.

Pièce lumineuse, Soeurs sirènes allie une écriture sensible à une mise en scène imagée qui ne craint pas de donner le temps aux personnages de grandir et de cheminer à leur rythme. Une belle production qui aborde les notions d’identité et d’acceptation de la différence et ouvre la porte sur des conversations essentielles à avoir avec les jeunes.

Soeurs sirènes, à l’affiche de la Maison Théâtre du 7 au 19 mars 2023

Crédit photo Jessy Lewandowski

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