Catégorie : Critiques
Là-bas : La valise comme métaphore du voyage intérieur
La sagesse populaire dit que dans le voyage ce n’est pas la destination qui importe, mais la route pour s’y rendre. Les trois comparses de Là-bas, lorsqu’ils arrivent sur scène soudés ensemble et ne formant qu’une seule bibitte, l’apprendront à leur corps défendant. L’empilement des valises sur le plateau indique d’emblée à quel genre d’aventure le public peut s’attendre. Mais dans une sorte d’inversion malicieuse, on comprend aussitôt que ce sont les malles et mallettes qui décideront de leur périple, pas eux.
Les danseurs étoiles parasitent ton ciel : Ça prend un village…
Comme la musique d’un cours de danse sociale résonnant dans les rues d’un quartier populaire un soir d’été, le récit des Danseurs étoiles parasitent ton ciel marque le tempo d’une valse à laquelle on prend tous part un jour ou l’autre, entre ambitions et désenchantements, rêves et réalité du quotidien.
Léon le nul : un spectacle qui va de bon train du début à la fin
En collaboration avec le Théâtre de la Pire Espèce, le Théâtre Aux Écuries présente une réécriture de la pièce Léon le nul mise en scène par son auteur, Francis Monty. Dans cette nouvelle édition du texte paru en 2018, c’est un narrateur qui se charge de raconter l’histoire de Léon au public. L’unique interprète du spectacle, Étienne Blanchette s’investit corps, voix et souffle pour faire vivre une douzaine de personnages sous le regard amusé des petits et des grands.
Le garçon de la dernière rangée : une intrigante sensation de catastrophe imminente
Le garçon de la dernière rangée relate les élucubrations d’un étudiant sournois et ténébreux, Claude (Vincent Paquette), qui s’immisce dans la demeure d’un camarade de classe, Raph (Samuel Bouchard), pour satisfaire sa curiosité maladive. En transposant par écrit son expérience intrusive, il avive un besoin malsain chez son professeur de littérature (Hugues Frenette) qui, à l’instar des spectateurs, se transforme en voyeur par personne interposée. Le talent de Claude pour les lettres se démarque des compositions insipides des autres étudiants, ce qui pousse l’enseignant blasé à provoquer, par le biais de critiques acerbes, les desseins déviants de son élève.
L’éveil du printemps : un hommage réjouissant aux désirs libres
Inspiré de l’œuvre de Frank Wedekind du même nom, L’éveil du printemps est une ravissante réécriture imaginée par David Paquet (Porc-épic, 2h14), mis en scène par Olivier Arteau (Doggy dans Gravel, Made in Beautiful (La belle province)). Pièce censurée pour sa dénonciation de « l’hypocrisie puritaine » du 19e siècle, elle conserve une pertinence déconcertante encore aujourd’hui en raison des thèmes qui y sont abordés. La coproduction du Trident et du Théâtre Denise-Pelletier reprend les sujets évoqués dans le texte original, soit les violences sexuelles, l’homosexualité, le BDSM, la masturbation et le suicide – principalement leur caractère tabou -, en les bonifiant de perspectives et d’enjeux plus actuels, tels que les questions environnementales et d’identités de genre. Le spectacle dépeint l’éveil du désir et l’acceptation de soi, dans un monde de destruction et de domination patriarcale capitaliste, faisant ainsi l’éloge du pouvoir des corps et de leur rencontre en dépit de la peur.
Une maison de poupée, 2e partie : la brillante suite d’un combat qui est toujours d’actualité
Imaginée telle la «suite» de la pièce Une maison de poupée écrite par Henrik Ibsen en 1879, Une maison de poupée, 2e partie est présentement à l’affiche au Théâtre du Rideau Vert. Traduit de l’anglais par Maryse Warda dans un français plutôt populaire, le texte du dramaturge américain Lucas Hnath place les personnages d’Ibsen quinze ans après que sa protagoniste Nora ait quitter les lieux de son ancienne vie de femme mariée et de mère au foyer. S’il est vrai que connaître la pièce d’Ibsen n’est pas nécessaire à l’appréciation de ce spectacle, il est clair que le public au fait de cette «1ère partie» ne peut que constater davantage à quel point le contexte du 19e siècle peut ironiquement faire écho à celui d’aujourd’hui.
Gaz Bar Blues : Une grande vague d’amour
Vingt ans après sa sortie au cinéma, le Gaz Bar Blues de Louis Bélanger renaît sur les planches de Duceppe. Et 20 ans après avoir été portée par la formidable interprétation de Serge Thériault, cette histoire d’un père de famille propriétaire d’une station-service dans le Limoilou de 1989 va toujours droit au cœur.
Dix quatre : Redite
Prenant la forme d’un presque huis clos, la pièce Dix quatre, de l’auteur canadien Jason Sherman, se passe dans une salle de réunion anonyme où quatre scénaristes tentent d’écrire la nouvelle série policière de l’heure avec tout ce que ça implique de policiers pleins de défauts, mais attachants, de moments de tension et d’héroïsme au milieu de drames personnels. Cependant, entre les divergences d’opinions sur le traitement des personnages et des thèmes et les interventions intempestives d’une productrice aux idées très arrêtées, les scènes de remue-méninges virent à la confrontation.
Albane : briser le cycle infernal de l’atavisme
Première production de la compagnie théâtrale La bouche _ La machine, Albane d’Odile Gagné-Roy est également la première mise en scène de cette jeune autrice et comédienne qui interprète le rôle-titre dans le spectacle. À l’ouverture des portes de la salle, six des sept personnages de la pièce sont déjà en place, immobiles comme des êtres inanimés qui attendent qu’on leur prête vie. L’impression qui se dégage du décor et des accessoires, dont certains sont surdimensionnés, des masques et des maquillages ainsi que de l’éclairage est intrigante et d’emblée porteuse de promesses.
Brillante : la force du nombre et du coeur
Que ce soit pour fuir des parents trop stricts, un foyer où l’amour s’est transformé en colère, une maison vide ou une menace sournoise et intime, les enfants perdus de Brillante trouvent un refuge frêle dans les ruines de ce qui fut autrefois leur école, lieu de rires, de jeux et d’apprentissages.