Catégorie : Critiques
Ciseaux : Devoir de mémoire accompli
Le théâtre documentaire a le vent en poupe depuis quelques années au Québec, et chaque compagnie, chaque production y apporte son ton et sa couleur, au grand bonheur des publics, nombreux et curieux, qui répondent à l’invitation.
Lettres de la ville-peinture : En manque de couleurs
Il y avait autrefois un petit garçon à l’imagination fertile et à la tête remplie de questions : pourquoi les humains ne sont-ils pas couverts de poils comme les chats ? Pourquoi les arbres n’ont-ils pas des yeux? Pourquoi la queue des chiens est-elle sur leur dos et pas sur leur tête ? Et surtout, comment le petit garçon peut-il faire pour que les créatures imaginées dans son sommeil ne disparaissent pas au réveil ?
Alice : un fantastique moment de rêverie
Librement inspirée des œuvres de Lewis Carroll par l’autrice et comédienne Emmanuelle Jimenez, Alice, la coproduction du Théâtre du Trident et du Théâtre Rude Ingénierie (TRI), s’adresse à l’enfant enraciné en nous. Mais peut-on parler d’un conte pour enfants ? Le monde dans lequel évolue le personnage principal de la pièce n’a rien de naïf ou de puéril, voire de juvénile. C’est un monde d’adultes, de bêtes étranges et d’automates réglés comme du papier à musique. Un monde de conventions, truffé de non-sens, de contresens et de doubles sens, qui recèle des mystères et des menaces très concrètes pour Alice.
The Loony Bin : Des marionnettes joyeusement déconfinées
Après avoir été contraint à l’arrêt pendant deux ans par une certaine pandémie, l’inimitable marionnettiste Ronnie Burkett était de retour à Montréal, à la Maison internationale des arts de la marionnette (MIAM), le temps de cinq représentations avec une nouvelle création encore au stade exploratoire. Car que fait un marionnettiste tenu loin des salles de théâtre sinon dresser un castelet de poche dans son salon et s’amuser avec ses créatures d’infortune?
TOQAQ MECIMI PUWIHT/Delphine rêve toujours : le tambour et les mots pour exister
Ondinnok s’associe à la compagnie de théâtre La Vieille 17 d’Ottawa pour proposer aux enfants de 4 ans et plus TOQAQ MECIMI PUWIHT/Delphine rêve toujours, écrit par le directeur artistique Dave Jenniss. Ce conte initiatique sur la transmission est présenté ces jours-ci au Théâtre jeunesse Les Gros Becs, puis partira en tournée, visitant d’ici avril 2023 Beloeil, Toronto, Montréal et Sudbury.
Grosse-Île, 1847 (dans les mots de ceux qui l’ont vécu) : Apprendre de l’histoire ?
Plusieurs connaissent Grosse-Île, jadis appelée Grace Island. Elle est située à l’est de l’Île d’Orléans, dans l’archipel de l’Isle-aux-Grues et a servi au 19e siècle de station de quarantaine pour les multiples bateaux d’immigrants qui affluaient vers le Canada. Mais est-on nombreux à connaître la véritable histoire de ce lieu et les drames qui s’y sont déroulés, alors que la maladie emportait les nouveaux arrivants ? La production du Théâtre de la Bordée met en lumière les événements dévastateurs de 1847 au moment où la petite île de 7,7 km2 s’est retrouvée aux prises avec un étrange microbe qui a tué quelques milliers d’êtres humains venus d’Irlande pour chercher un monde meilleur.
Un.Deux.Trois : qui es-tu?
Force est de constater que l’idée de réunir les trois premières parties de sa série décalogique (qui ne compte pas totalement dix pièces, mais qui se décompte jusqu’à 10), de la part de l’auteur, metteur en scène et comédien Mani Soleymanlou, est une riche idée, même si elle n’est pas nouvelle.
Maurice : Oupalaï !
Tout a commencé il y a une trentaine d’années. Maurice avait alors 33 ans. L’âge du Christ. Foudroyé par un AVC, sa vie culbute, sa brillante carrière d’économiste trépasse, son quotidien éclate. La déflagration est telle qu’elle s’est encastrée dans la cloison de sa cuisinette comme un formidable coup de poing du destin. La scène est sombre, les murs sont noirs, une petite table, striée de lumière blanche comme filtrée par un store vénitien, attend avec ses deux chaises. Entre Maurice, seul, aphasique. Il s’assoit. Lentement, soigneusement, il épluche une orange et la déguste. Puis il se lève difficilement et sa soif des autres explose. Pas de quatrième mur. Il s’adresse directement au public en peu de mots et en s’aidant de son unique main valide. Mais avec une émotion si intense qu’on dirait qu’elle brûle, prisonnière d’une bouteille de gaz qu’on a trop secouée.
Une journée : Piégés par l’ordinaire
Qui ne s’est pas déjà senti prisonnier d’une routine dans laquelle il s’est enferré? Et qui n’a pas un jour ou l’autre rêvé de s’en échapper? Les quatre personnages de la pièce Une journée, qui prend l’affiche au Théâtre de Quat’sous ce mois-ci, se débattent avec cette banalité.
Cyclorama : Fascinante leçon d’histoire et début d’un dialogue
Depuis ses années d’études à l’École nationale de théâtre/National Theatre School of Canada, où les volets francophones et anglophones ne se mêlaient pas, Laurence Dauphinais s’interroge sur ce qui sépare encore aujourd’hui les deux milieux culturels, à Montréal, qu’on dit pourtant si cosmopolite. On se partage une île et une histoire, mais que sait-on vraiment l’un de l’autre au-delà des clichés? On s’ignore au quotidien, ne fréquentant ni les mêmes auteurs, ni les mêmes lieux, ni les mêmes artistes. Pourquoi cette vie en parallèle?